18 Août 2017
Voici aujourd'hui le deuxième volet de la trilogie des Pichoulis, cette ferme permaculturelle expérimentale et pédagogique que je vous présentais la dernière fois ! Et aujourd'hui, je vous parle de la formation proprement dite, le cours certifié en permaculture, aussi appelé cours de conception en permaculture, bref, le CCP.
Je ne vais pas vous raconter la formation par le menu, pour deux bonnes raisons :
Un CCP, c'estquoidonc ?
Un CCP, c'est une formation de 72h minimum, répartie sur plusieurs jours ( ici 12 jours ). L'une des premières choses que je peux vous dire, c'est qu'un CCP ne va pas vous apprendre à faire des buttes : c'est énormément plus que ça, il ne s'agit pas d'apprendre un outil ou une technique pour l'appliquer, mais de se l'approprier, de savoir pourquoi on l'utilise ainsi que ses conséquences au sens large sur la construction de votre projet. Reprenons l'exemple de la butte, si cette technique n'est pas appropriée pour VOTRE terrain, votre sol, votre climat, bin... oust, exit la butte... fort heureusement, la permaculture est très loin de se résumer aux buttes !
Votre créativité va être mise au premier plan, et votre conception du monde en général risque de connaitre une certaine évolution.
C'est une formation qui mêle connaissance théoriques à propos de la permaculture, mais aussi de la pratique : des ateliers, comme l'atelier reconnaissance des plantes sauvages ...
... des mise en pratique des enseignements et la réalisation d'un design. Le mot design est difficile à traduire dans ce contexte, car il ne renvoie pas du tout à l'image que l'on s'en fait (ça n'a rien à voir avec un meuble ou un objet design !) : un design en permaculture, c'est le dessin, la construction d'un projet (de vie, d'entreprise, d'asso, de lieu de vie) en s'appuyant sur l'éthique et les principes de base de la permaculture.
Pour ce CCP, plusieurs groupes sont formés et travaillent en autonomie sur des projets apportés par les stagiaires eux-mêmes.
Un socle de connaissance commun
Les connaissances qui doivent être transmises sont regroupées dans un format validé par l'Université Populaire de Permaculture, et les cours sont dispensés et/ou encadrés par l'un des 17 formateurs agréés par cette même entité. Pour cette session par exemple, le formateur était Jean Irubetagoyena, aussi parfois espièglement appelé "le vieux sage Basque au nom imprononçable". (hum)
Si un socle identique de connaissances doit être transmis dans tous les CCP, les formateurs (comme tout formateur, d'ailleurs) sont des êtres humains qui ont leurs propres sensibilités. Ajoutons les spécialisations de chacun.e.s (architecture, microbiologie, chimie, agronomie ou botanique), on obtient alors, au-delà du socle commun, un CCP qui porte la marque, la patte, du formateur. Dans ce CCP, il semble que la question des patterns suscite une remise en question de la conception du monde qui peut provoquer des émotions vraiment particulières du côté des stagiaires, et d'ailleurs, si j'ai un regret, c'est de n'avoir pu assister à ce cours dont j'ai entendu parler en long, en large et en travers et qui m'intrigue énormément.
Une prise en compte de l'humain et de la dynamique de groupe
En tant que bénévole pour ce CCP, j'ai pu participer aux réunions pédagogiques quotidiennes. J'ai pu m'apercevoir à quel point l’organisation aux Pichoulis tient compte autant de la qualité de la formation, de la logistique que de l’humain. L'équipe pédagogique est restée tout le temps très attentive à chacun, non seulement au sein de la formation en elle-même mais aussi au sein du groupe et du lieu. J'ai ainsi vu cette équipe s'adapter au ressenti des apprenants et également des formateurs, et décider de modifier la stratégie pédagogique, ou de modifier le rythme tout en veillant à ce que le contrat pédagogique soit rempli.
C'est donc quelque chose de global qui dépasse largement le champ d'une formation classique.
Le CCP, élitiste ou pas élitiste ?
Le CCP a un coût non négligeable. Le CCP de cette année coûtait 640 €, nourriture et hébergement compris. Et si, avant, la prise en charge par pôle emploi était envisageable, il semble que cela soit fortement remis en question voire abandonné, ce qui est d'ailleurs un très mauvais signal concernant la politique environnementale et consumériste de notre gouvernement. Un coût non négligeable donc, mais qui repose sur des frais bien réels pour les assos qui les organisent : la nourriture, la rémunération des différents intervenants et salariés de l'asso, ou encore les charges diverses viennent immédiatement à l'esprit mais il y a bien d'autres postes de dépense, et malgré ce coût, il arrive que ces assos fonctionnent à perte ou juste à l'équilibre sur ce type de formation.
Ce n'est donc pas du tout un prix gonflé par l'appât du gain, mais malgré tout il reste discriminatoire pour de nombreuses personnes pour qui il est inenvisageable de dépenser une telle somme sans aménagement. Bien sûr, je suis la première à le dire, on peut mettre des priorités à notre budget, le prévoir des mois en avance, renoncer à certains achats, je développe ici plein de pistes pour permettre à des personnes qui ont de petits revenus de financer des projets qui leur tiennent à coeur, mais je sais aussi que le prix, comme ça, de but en blanc, peut fermer des portes.
Le second point, qui ne reflète vraiment que mon avis personnel, est la somme de connaissances théoriques à assimiler lors d'un CCP. Nous ne sommes pas tous égaux devant l'assimilation de connaissances théoriques, pour diverses raisons, et le format UPP peut de ce point de vue se révéler, lui aussi, discriminant pour certaines personnes, et même devenir un frein pour son propre développement : si l'un des objectifs est de toucher un très grand volume de population, se fermer pour ces raisons à toute une catégorie de personnes peut sembler contre-productif.
Cependant, ce que j'ai pu observer lors de mon expérience, vient tempérer ces remarques.
La question de la sociocratie
La sociocratie et la permaculture ont des affinités toutes particulières. C'est donc quelque chose qui revient régulièrement dans la conception des CCP. Certains CCP vont vraiment appuyer sur cette question et proposer au groupe de se structurer lui même à partir de presque rien, d'autres, comme celui des Pichoulis, vont proposer une approche un peu différente : l'orga propose des règles de bases mais enseigne des outils et laisse petit à petit au groupe l'opportunité de faire évoluer son fonctionnement. De ce fait, chaque groupe aura une dynamique particulière car son appropriation de la formation, du lieu et de la vie en collectivité sera unique.
le CCP, hippie or not hippie ?
... that is the question. Pour moi, clairement, à moins de confondre expérience de vie en communauté et pratique hippie-new-age, un CCP n'est pas hippie en soi. Mais bien sûr, tout va dépendre de la conjonction particulière entre les éléments suivants :
Voilà pour ce retour en images du volet pédagogique du CCP mis en place par les Pichoulis cette année, si vous avez vous-même suivi un CCP, ici ou ailleurs, vos retours seront les bienvenus !
Je vous retrouve très bientôt pour vous raconter ce que cette expérience
m'a particulièrement apporté !